EPOCH, la Guerre des Mondes
HISTORIQUE
L’Exode
Lorsque la Flotte d’Exode de la Confédération Humaine - appelée plus communément Flotte de la Débâcle par certains - quitta l’atmosphère terrestre, elle comptait 48 croiseurs de type Salvator et 5 super-destroyers de catégorie Titan pour environ 35 millions de passagers et membres d’équipage. Sa mission principale – s’éloigner au plus vite du système solaire, et à fortiori de la planète Terre – prit presque quatre mois et il fallut près d’une année supplémentaire pour que le système solaire disparaisse enfin définitivement des systèmes de détection des navires, emportant avec lui les angoisses de millions de passagers.
L’Amiral Enlyle, en charge du commandement de la Flotte d’Exode, put alors officialiser la fin de l’état d’urgence et entériner la recherche de mondes habités comme nouvel objectif prioritaire. En tant que plus haut gradé, il avait sous ses ordres l’ensemble des forces militaires de l’Armada. Au sein des super-destroyers Titan, cela correspondait à l’intégralité des passagers : du simple soldat au pilote de marcheur de combat, tous étaient des professionnels l’Armée de la Confédération Humaine (ACH), et donc directement sous ses ordres. Dans le cas des croiseurs Salvator, La configuration était totalement différente : 95% de la population était composée de familles civiles, rescapées, qui œuvraient aux diverses tâches secondaires du vaisseau (entretien, production, ravitaillement et services administratifs divers) tandis que les effectifs militaires, bien qu’ultra-minoritaires, occupaient les postes clés du vaisseau (officiers, membres d’équipage, forces de sécurité, navigateurs, pilotes, servants d’artillerie).
L’Amiral Enlyle s’était ainsi retrouvé investi de toute l’autorité nécessaire pour statuer sur les lois régissant la vie de millions de ses concitoyens. Même si il disposait de ressources propres à assurer la sécurité et à pourvoir aux besoins vitaux de l’ensemble des passagers pour une durée quasiment illimitée, il était conscient d’avoir à sa charge la mission la plus accablante de l’Histoire : mener le peu qu’il subsistait de la race humaine vers un nouveau foyer, à l’abri des terribles Avoydes.
L’épisode du Dabow
La Flotte d’Exode passa dix années terrestres à suivre une trajectoire erratique afin de semer d’éventuels poursuivants. Durant cette période, ils inventorièrent une centaine de planètes inconnues, toutes impropres à la colonisation. Cela n’inquiétait pas outre mesure l’Etat-major. L’Armada avait suffisamment d’eau, grâce aux systèmes de recyclage, de nourriture, grâce aux fermes hydroponiques, et de carburant, plasmique et nucléaire, pour des décennies de navigation… Mais, au fil du temps, les règles de vie spartiates commençaient à peser sur les esprits de la population civile qui désespérait de trouver enfin un jour une planète habitable sur laquelle fonder les bases d’une nouvelle civilisation.
Les chercheurs et scientifiques de l’université basée sur le croiseur Dabow émirent des propositions afin d’optimiser les processus de recherche de planètes candidates à la colonisation – rationalisation des trajectoires de navigation, modification de chasseurs de combat Navajo en astronefs de reconnaissance, fabrication de torpilles-sondes – mais leurs requêtes furent systématiquement repoussées par l’Etat-major de la Flotte .
Le plus célèbre et le plus respecté de ces scientifiques, le jeune astrophysicien Pascal Avogadro, exposa publiquement les recommandations de ses équipes avant de critiquer ouvertement l’entêtement de la junte militaire à déconsidérer systématiquement les avis éclairés de la société civile. Les propositions d’Avogadro devinrent rapidement extrêmement populaires auprès d’une frange de l’opinion publique mais l’Etat-major de la Flotte ne tint compte ni de ses requêtes ni des soutiens grandissants dont bénéficiait le scientifique. Grisé par l’engouement qu’il avait suscité, Avogadro demanda la tenue d’un référendum général concernant la reforme des pouvoirs institutionnels de la Flotte.
L’amiral Enlyle, inquiet de perdre une partie de ses prérogatives, fut dans l’obligation d’ordonner l’incarcération d’Avogadro pour trouble à l’ordre publique. La réaction fut immédiate et une grève spontanée fut décrétée par plusieurs corps de métier sur l’ensemble des croiseurs Salvator. L’Etat-major déclara ces mouvements illégaux et proclama le retour à l’état d’urgence. L’ensemble de l’armée et des forces de maintien de l’ordre furent mobilisées pour forcer la reprise du travail.
Sur le Dabow, les esprits commencèrent sérieusement à s’échauffer lorsque les navettes des forces de police militaire tentèrent d’accoster pour procéder à l’arrestation de l’astrophysicien Avogadro. Les dockers bloquèrent les appontements en détruisant les systèmes d’ouverture des canaux pressurisés tandis que plusieurs milliers de grévistes prenaient la passerelle de navigation d’assaut. Largement submergés par le nombre, les forces de l’ACH durent abandonner leurs postes pour se réfugier dans différents sas sécurisés. Quelques-uns parvinrent même à rejoindre des modules de sauvetage et s’échappèrent afin de faire leur rapport à leur Etat-major. Le mouvement de contestation initial à bord du Dabow s’était transformé en véritable mutinerie.
Afin de sécuriser la situation, l’Amiral Enlyle coupa toutes les communications provenant du navire félon, astreignit les populations civiles de chaque bâtiment à rejoindre ses quartiers et ordonna l’exécution des manœuvres d’immobilisation contre le Dabow. Le Decallyon, navire-amiral de la Flotte, et deux autres destroyers se positionnèrent autour du croiseur renégat avant de faire feu sur les réacteurs et les générateurs de boucliers. À la suite de quoi, les chasseurs Navajo et bombardiers Viking purent se charger de la destruction des pièces d’artillerie. Une fois le croiseur rebelle immobilisé, les trois super-destroyers formèrent un blocus autour du Dabow qui dérivait lentement, inoffensif, au milieu de ses propres débris.
L’Amrial Enlyle avait bien conscience du fait qu’il lui était impossible de procéder à la destruction pure et simple du croiseur. Il y avait encore à bord plus d’une centaine de soldats et le massacre de centaines de milliers de civils innocents, manifestement pris en otage par les renégats, risquait d’attiser la fureur des passagers du reste de la Flotte. Même si l’ACH n’avait pas coutume de ce genre de situation – après tout, qui aurait pu bien vouloir pénétrer à l’intérieur d’un vaisseau Avoyde ? - et n’avait à sa disposition aucun équipement dédié à l’arraisonnage spatial, il devint pourtant évident qu’un abordage en règle était la seule solution censée.
Les équipes techniques travaillèrent dix jours durant d’arrache-pied pour effectuer les améliorations adéquates sur les marcheurs de combats IGUANA 911, notamment au niveau de la magnétisation des membres inférieurs, de l’étanchéité du châssis et de la mobilité des tuyères. Dix jours pendant lesquels la tension se fit sentir au niveau des passagers du reste de la Flotte, confinés dans leurs logement, épluchant avidement chaque enregistrement vidéo pirate du Dabow encerclé par ses trois gigantesques geôliers.
Puis, sans crier gare, les trois super-destroyers se mirent à vomir des centaines de fantassins engoncés dans leur armure de combat modifiée. Propulsée par leur tuyère d’évacuation, la nuée de fantassins blindés se précipita sur le Dabow. Si quelques-uns ne purent atteindre le croiseur et durent être récupérés plus tard par des transporteurs Indians, la plupart des marcheurs de combat parvinrent tout de même à se stabiliser sur la coque du Dabow, aimantés par le nouveau grappin magnétique ajoutés à leurs membres inférieurs, avant de s’y attaquer à l’aide de rayon plasmatiques, dépeçant les parois du navire couche après couche afin de s’y introduire.
Une fois à l’intérieur, les marcheurs de combat I-911 prirent position au sein des espaces les plus dégagés du croiseur – les baies d’appontements, les parcs hydroponiques, l’avenue commerciale – pour pouvoir y déverser toute leur puissance de feu. Les renégats, bien plus nombreux que le supposait l’Etat-major, avaient revêtu des combinaisons pressurisées et tentaient de repousser vaille que vaille les machines lourdement blindés à l’aide d’armes de fortune. Ils n’avaient aucune chance face au blindage et à l’armement lourd des marcheurs de combat qui, sans état d’âme, firent un véritable carnage parmi les défenseurs rebelles. Il ne fallut qu’une poignée d’heures aux forces de l’ACH pour sécuriser les halls principaux et les couloirs attenants, et rendre à nouveau opérationnels les couloirs d’appontement pour permettre l’évacuation de leurs collègues retranchés dans les sas sécurisés.
L’opération d’exfiltration se fit dans le calme le plus complet, les combats avaient pris fin définitivement. L’armée n’avait perdu que cinq hommes au total tandis que l’estimation des pertes dans le camp des rebelles se montait à plusieurs centaines de milliers. Cela laissait encore près d’un demi-million de passagers en vie, sûrement terrés dans les niveaux inférieurs, mais l’Etat-major de la Flotte n’en avait cure.
Une fois les combattants rapatriés, l’Amiral Enlyle organisa une grande cérémonie générale, félicitant les forces armées et fustigeant les traîtres, pleinement responsables, de par leurs actes, du malheur qui s’était abattu sur eux. Il termina son allocution visuelle en faisant part de la décision de l’Etat-major de livrer le reste des passagers du Dabow à leur triste sort, dérivant dans l’espace jusqu’à ce que mort s’en suive. L’Amiral espérait ainsi tuer dans l’œuf, et de manière définitive, toute nouvelle envie de mutinerie.
De fait, lorsque la Flotte d’Exode abandonna le Dabow derrière lui, aucune voix contestataire ne se fit entendre.
La Dissension
Durant trente années, la Flotte de l’Exode continua sa course erratique à travers les étoiles. Toujours sous le joug de la loi martiale, la population œuvrait quotidiennement à la bonne marche des 57 croiseurs Salvator restants. Malgré l’arrivée de nouvelles générations, personne n’osait contester ouvertement la suprématie de l’Etat-major. Pourtant, le flot de récriminations, bien que silencieuses, ne cessaient de s’alourdir. Les inégalités ne cessaient de se creuser de toute part, entre les employés civils et militaires, entre les ponts inférieurs et les ponts supérieurs et même entre les vaisseaux eux-mêmes. Quand la plupart trimaient quotidiennement pour le minimum vital, d’autres jouissaient de lieux de vies, de mets ou de loisirs raffinés. Cela paraissait d’autant plus injuste au plus grand nombre qu’il était de notoriété publique que les ressources critiques de la Flotte - énergie, eau, oxygène et certaines matières premières – commençaient sérieusement à s’épuiser. Comble de malchance – d’incompétence selon certains - aucune des planètes abordées pendant ce périple n’avait pu remplir les critères nécessaires à sa colonisation.
Paradoxalement, c’est la mort du vieil amiral qui mit fin à ce statut-quo. À peine la cérémonie funèbre avait-elle pris fin que l’Etat-major de l’AHC avait nommé le fils ainé de feu l’ancien Amrial Enlyle, pourtant tout récent capitaine de super-destroyer, à sa tête. Beaucoup de passagers vécurent cela comme une véritable trahison : à leurs yeux, non content d’entretenir un système de castes et de privilèges iniques, la junte militaire venait de poser la première pierre d’un système dynastique. Les quelques individus qui osèrent laisser éclater leur colère sur le réseau général de communication furent rapidement identifiés puis incarcérés. Cela ne fit que renforcer la détermination des plus amers qui commencèrent à se réunir dans le plus grand secret.
Afin de ne pas alerter le pouvoir en place, de petits réseaux indépendants s’organisèrent discrètement un peu partout. Les centres de recherche et les stations de production furent les premiers foyers de contestation. Des systèmes de marché noir et de canaux d’informations clandestines se mirent en place sur certains vaisseaux. Un petit journal numérique pirate, le Dabow, fit même son apparition sur certains canaux privés. Certains croiseurs furent rapidement considérés comme moins surveillés que d’autres et des mouvements de population commencèrent à se mettre en place discrètement. Nombreux furent les passagers qui changèrent leur emploi ou leur logement, presque systématiquement en leur défaveur, pour retrouver un groupe, un réseau ou tout simplement un environnement plus libertaire. Sans véritable organisation ou leader charismatique à la tête de ce courant, tout cela restait cependant totalement inoffensif. Et suffisamment discret pour éviter d’alerter les autorités militaires.
Le jeune amiral Enlyle n’était à la tête de la flotte que depuis quelques années lorsque le canal de communication général fut parasité par un message générique qui se disait provenir du croiseur abandonné Dabow. Le message succinct, signé du nom de l’astrophysicien Avogadro, livrait les coordonnées d’un système planétaire censé regrouper plusieurs mondes habitables. Les équipes techniques récupérèrent rapidement le contrôle du système de communication. Des enquêtes furent effectuées au sein de la Flotte, en vain. Tout un chacun, de l’armée aux réseaux libertaires, supposa naturellement qu’il s’agissait d’une provocation provenant d’un ou de plusieurs individus hostiles à l’Etat-major. Ce n’est que quelques jours après, lorsque la signature énergétique d’un navire inconnu fut interceptée par les capteurs longue-distance, que la vérité éclata : l’authentique navire renégat était de retour.
En premier lieu, le Dabow se rapprocha suffisamment de la Flotte pour être formellement identifié puis, suite à quelques tentatives d’approche de super-destroyers TITAN, manœuvra habilement pour se retrouver hors de portée des canons à ions et des torpilles longue distance de l’armada. Il était invraisemblable qu’un croiseur Salvator puisse faire preuve d’une telle rapidité et d’une telle agilité. De même, il aurait dû être impossible à un appareil de cette catégorie de pirater le canal de communication de la Flotte à une telle distance. Ce fut pourtant de nouveau le cas lorsqu’une voix claire s’imposa dans les haut-parleurs de chaque bâtiment :
« Bonjour à tous,
Ici, Pascal Avogadro, capitaine du Dabow. Je m’adresse à l’ensemble de la population de la Flotte de la Confédération Humaine.
Nous avons trouvé un super-système planétaire à quelques semaines de voyage d’ici. Ce système planétaire est basé autour d’une étoile supra-géante - que nous avons baptisé Epoch – et qui, aussi incroyable que ça paraisse, regroupe en son sein plus d’une centaine de planètes de catégorie A à G. Nous avons d’ores et déjà la certitude que nombreuses d’entre elles sont colonisables par l’espèce humaine. Chacun d’entre vous devrait pouvoir voir les coordonnées de ce système s’afficher en ce moment-même sur son moniteur personnel.
Au regard de nos propres stocks, je suppose que vous disposez vous aussi de ressources pour quelques années à peine. Le système Epoch est peut-être votre dernière chance de fonder un nouveau monde.
Mes collaborateurs et moi-même avons décidé d’élaborer une nouvelle forme de civilisation, basée sur la puissance de l’esprit et le respect de la vie. Chacun d’entre vous est le bienvenue parmi nous. Pour ceux qui préfèrent rester confinés sous le joug de la logique militaire, et malgré le traitement que vous nous avez fait subir, nous vous fournissons ces informations en tant que dernier gage de notre parenté humaine.
Un nouvel espoir s’ouvre à nous. L’Apogée est devant nous. J’espère que vous ne la repousserez pas.
Une dernière chose… Si nous avons réussi à vous retrouver si facilement, je doute que cela soit compliqué pour les Avoydes d’en faire de même. Prenez-garde à vous.
Ici, le capitaine Avogadro à bord du Dabow. Terminé. »
Instantanément, tandis que l’Etat-major tenait un Conseil de Crise pour statuer sur la marche à suivre, d’immenses foules se réunirent spontanément dans les parcs, les halls commerciaux, les amphithéâtres et les principales artères des croiseurs. Ces réunions spontanées, exemptes de toute agressivité, engendrèrent rapidement des débats publics improvisés où tout un chacun tentait de s’informer ou de faire part de son opinion. La situation se dégrada rapidement lorsqu’une centaine d’étudiants de l’université du croiseur Deboran s’emparèrent d’une frégate de transport afin de rejoindre le croiseur Dabow.
Les opérateurs du Super-Destroyer Yimajam donnèrent l’ordre à la frégate de s’immobiliser immédiatement et firent feu de leurs batteries à plasma en guise de première sommation. Les occupants de la frégate ne prirent pas la peine de répondre à l’avertissement des soldats et poussèrent encore un peu plus leurs réacteurs. Lorsque le Yimajam effectua sa deuxième sommation, la voix du capitaine Avogadro s’imposa à nouveau sur le réseau de communication général.
«Cessez le tir immédiatement ! Cette frégate est sous la protection de l’Apogée. Je répète : cessez le feu ou nous serons tenus d’intervenir ! Ici le capitaine Avogadro. Terminé.»
Le commandant du super-destroyer Titan Yimajam, dépassé par la situation, demanda à l’Etat-major de confirmer ses ordres. La frégate menaçait maintenant de sortir de la zone de tir des canons à ions. Le jeune Amiral Enlyle en personne somma une nouvelle fois la frégate de couper ses réacteurs puis, après plusieurs minutes de silence, ordonna la destruction de la navette. Le Yimajam fit feu de ses trois canons à ions. Les rayons touchèrent simultanément les réacteurs, le pont inférieur et la proue de la frégate qui se désintégra dans un nuage de débris et de boules d’énergie bleutées.
Le croiseur Deboran fut le premier à réagir. La plupart des soldats de ce navire connaissaient d’une façon ou d’une autre l’un des jeunes étudiants qui venaient de périr sous leurs yeux. Le capitaine lui-même venait de perdre deux de ses petits-enfants. Les croiseurs Salvator ne sont pas des navires de guerre à proprement parler mais disposent tout de même d’un arsenal défensif tout à fait remarquable. Le Deboran pivota lentement sur lui-même avant de faire feu de ses batteries laser de flanc sur le super-destroyer Yimajam. Même le blindage renforcé de ce dernier ne pouvait résister à une bordée de tirs lasers à bout-portant et sa coque inférieure se déchira sur plusieurs kilomètres. Éventré de part en part, le Yimajam riposta toutefois magistralement avec l’ensemble des armes à courte portée dont il disposait. Des pans entiers du Deboran disparurent instantanément sous les explosions redoublées. Le croiseur était déchiré de part en part. Une partie de la grande place et de son parc forestier flottait même au milieu du vide spatial, entourée d’une multitude de débris et de cadavres pétrifiés.
Le super-destroyer Yimajam, qui dérivait lentement suite à la déchirure qui lui déséquilibrait le flanc, eut à peine le temps de catapulter ses chasseurs de combat avant que trois autres croiseurs civils le prennent à leur tour pour cible et l’achèvent, en guise de représailles. La situation s’aggrava alors de manière exponentielle.
Les explosions consécutives du super-destroyer et du Deboran avaient généré un maelstrom de débris en tous genres qui se mirent à parasiter l’ensemble des radars de la Flotte. De nombreuses émeutes éclatèrent un peu partout sur les croiseurs tandis que plusieurs capitaines tentaient de s’éloigner au maximum de la zone des combats. Des échanges de tirs sporadiques éclataient entre plusieurs navires. Trois croiseurs se percutèrent dans la panique et leur explosion ajouta encore un peu au désordre ambiant.
En quelques poignées de minutes, la Flotte venait de perdre plusieurs millions de passagers et l’Armée de Confédération Humaine tentait frénétiquement de coordonner leurs actions afin de rétablir le contrôle. Rapidement, un cordon de sécurité s’établit autour des quatre super-destroyers Titan restants et de quelques croiseurs dont la loyauté était peu ou prou établie. La situation se décantait quelque peu alors que les échanges de tirs et les collisions entre croiseurs se poursuivaient.
Six d’entre eux s’éloignaient à présent du reste de la Flotte, en direction du Dabow. Y discernant clairement un signe de rébellion, le jeune amiral Enlyle ordonna qu’on poursuive et qu’on détruise les croiseurs renégats. Plusieurs escadrilles de chasseurs furent lancés à leurs trousses tandis que les super-destroyer restaient sur place pour immobiliser ou détruire les derniers navires belligérants de la zone de combat.
C’est alors que le Dabow dégorgea une multitude de petits drones non-identifiés. Il s’agissait de petits appareils à peine plus grands qu’une aile de chasseur Navajo mais qui semblaient se déplacer avec une aisance sans pareil. Rapidement, la nuée de drones dépassa les croiseurs renégats qui tentaient de rejoindre le Dabow et formèrent un gigantesque demi-cercle rotatif devant les escadrilles de chasseurs de la Confédération. Ces derniers tirèrent sans hésiter sur les petits appareils qui explosèrent dans d’immenses déflagrations de plasma. Le Dabow venait de créer un champ de mines à plasma mobile pour empêcher les chasseurs de poursuivre leur route. Quelques pilotes téméraires tentèrent de traverser ou de contourner le champ de mines mais les drones étaient bien trop rapides pour leur en laisser la possibilité. Les pilotes n’eurent d’autre solution que de détruire les drones un par un, réduisant ainsi rapidement leur possibilité d’interception des six croiseurs renégats à néant. Rapidement, ces derniers rejoignirent le Dabow avant de s’éloigner de ce qu’il restait de la Flotte d’Exode.
Suite à ce nouveau désastre, l’Amiral Enlyle fit preuve d’une efficacité et d’une implacabilité dans faille. Les derniers croiseurs belligérants furent rapidement mis hors d’état de nuire. Des troupes d’assaut, escortés d’escouades de police militaire furent rapidement déployées sur chaque croiseur afin d’en garder le contrôle absolu. Des tribunaux militaires à sentence immédiate furent mis en place sur chaque navire et des pelotons d’exécution œuvrèrent à rétablir la justice pendant plusieurs semaines.
Sur les 48 croiseurs Salvator qui avaient quitté la terre, il n’en restait plus que 29 aux ordres de la Confédération humaines. Sept avaient déserté leurs rangs et douze avaient été détruits d’une manière ou d’une autre. La flotte resta sur place pour récupérer tout ce qui pouvait l’être des carcasses de navires ou des débris environnants avant de se diriger vers les coordonnées indiquées par Avogadro dans son message. L’amiral Enlyle avait bien l’intention de retrouver les félons et de leur payer leur trahison au centuple.
Le Système Epoch
Les astronavigateurs de la Flotte de Confédération Humaine purent établir la véracité des informations fournies par Avogadro bien avant d’avoir rejoint les coordonnées émises.
De fait, Epoch, l’étoile supra-géante, état si imposante qu’elle devait être visible à plusieurs milliards d’année-lumière. Autour d’elle, gravitait ce que l’on pouvait également appeler un supra-système planetaire.
Même si l’Amiral Enlyle insistait en permanence sur les risques d’embuscade, il fut rapidement établi que le système était si vaste qu’il aurait été quasiment impossible de repérer quelques croiseurs au milieu de la foison de corps spatiaux qui s’y trouvaient.
Le système Epoch compte exactement 136 planètes de tous types, sans compter les satellites qui orbitent autour de certaines d’entre elles ni les astéroïdes en tous genres qui évoluent dans différentes zones. La variété des planètes analysées avait de quoi impressionner même les plus blasées des ingénieurs de la Flotte de Confédération Humaine. Avec ou sans atmosphères, environnements gazeux ou liquides, avec ou sans trace de vie, certaines sont intégralement recouvertes de roche en fusion ou de cyclones toxiques. Tandis que les planètes à la périphérie du système connaissent des températures effroyablement basses à leur surface, il fut impossible aux navires de la Flotte de s’approcher des planètes les plus au centre du système planétaire sous peine de griller littéralement sous l’incommensurable chaleur de l’étoile supra-géante.
C’est dans la zone centrale du système planétaire que les astronavigateurs trouvèrent le plus de planètes propres à la colonisation humaine. Après concertation, l’Etat-Major en sélectionna une - qu’elle baptisa Arcan - pour planète capitale. Trois croiseurs s’y posèrent afin de créer la première colonie de la Confédération Humaine. Le navire-amiral Decallyon se positionna sur son orbite tandis que le reste de la flotte s’éparpilla vers les planètes environnantes afin de créer de nouveaux foyers. Il restait encore fort à faire pour s’assurer de la survie de la race humaine…
Auteur: Fabien COUROUX